TA Châlons-en-Champagne, 16 janvier 2014, n° 1400029
Les membres de la famille d’un patient dans un état pauci-relationnel ont formé un référé liberté auprès du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne demandant la suspension de l’exécution de la décision du chef de service stoppant l’alimentation et l’hydratation artificielle.
Le Tribunal administratif a donné raison aux requérants et a suspendu l’exécution de la décision du chef de service en se fondant, notamment, sur l’absence de preuve de la volonté du patient à ne pas être maintenu en vie et sur l’absence d’obstination déraisonnable.
1- Sur l’absence de preuve de la volonté du patient.
Le juge estime que la preuve de la volonté du patient de ne pas être artificiellement maintenu en vie n’est pas rapportée, contrairement à ce que prétend une partie de la famille.
En effet, ce patient n’avait pas rédigé de directives anticipées et ni désigné une personne de confiance, mécanismes qui auraient permis de témoigner de la volonté du patient.
Le juge relève également que la position que le patient aurait exprimée auprès de sa famille de ne pas vouloir être maintenu en vie, ne peut être ni datée, ni prouvée.
En outre, selon le Juge, « cette position émanait d’une personne valide qui n’était pas confrontée aux conséquences immédiates de son souhait et ne se trouvait pas dans le contexte d’une manifestation formelle d’une volonté expresse, et ce quelle qu’ait été sa connaissance professionnelle de la situation de patient en état de dépendance ou de handicap. »
Enfin, les manifestations, exprimées par le patient, pouvant traduire le déplaisir ou l’inconfort qu’induisaient les soins, et qui ont cessées à la date du jugement, ne peuvent être interprétées comme l’expression d’une volonté du patient de rester ou non en vie.
2- Sur l’absence d’obstination déraisonnable.
Le Tribunal s’est prononcé sur la nature de l’alimentation et de l’hydratation artificielle qui constituent selon lui de réels traitements médicaux du fait de leur attachement au monopole de distribution des pharmacies et du fait de leur objectif, l’apport de nutriments à la personne dont les fonctions sont altérées.
Mais, pour le cas particulier des patients en état pauci-relationnel, l’alimentation et l’hydratation n’ont pas pour objectifs de maintenir le patient artificiellement en vie et ne provoquent aucune contraintes ou souffrances.
De ce fait, le juge a retenu que l’alimentation et l’hydratation artificielles ne constituaient pas des mesures qualifiées d’inutiles ou de disproportionnées et que l’obstination déraisonnable n’était pas constituée.
Le Tribunal a donc considéré que, du fait de l’absence de la connaissance de la volonté de la victime et de l’absence d’obstination déraisonnable, l’alimentation et l’hydratation artificielles devaient être maintenues.