Le cabinet ORIOR vous propose un lexique des termes les plus fréquemment utilisés pour évaluer un préjudice corporel.
Le préjudice temporaire est celui qui survient avant la consolidation. Il correspond à peu près à la période de convalescence. Le préjudice permanent est celui qui persiste/survient après la consolidation. Il correspond aux séquelles.
Les préjudices patrimoniaux ou extra-patrimoniaux peuvent être soit temporaire (avant la consolidation) soit permanent (après la consolidation).
Le terme « patrimonial » signifie quelque chose qui fait partie du patrimoine et qui a une valeur économique. De ce fait, les préjudices patrimoniaux ont un caractère pécuniaire qui peut correspondre à des pertes financières (perte de salaire) ou à des gains manqués (le profit que la victime aurait pu réaliser si elle n’avait pas été victime de l’accident).
Les préjudices extra-patrimoniaux ne concernent pas le patrimoine. Ils portent sur ce qui peut toucher directement la personne. Par exemple le vécu traumatique de l’accident par la victime, les souffrances endurées par la personne à la suite de son accident ou le préjudice esthétique (cicatrice par exemple).
Les dépenses de santé actuelles sont l’ensemble des dépenses de santé engagées par la victime à partir de l’accident jusqu’à la consolidation. Ce sont par exemple les frais médicaux (IRM) , de consultation médicale, les frais de médicaments, les consultations paramédicales (consultation chez un psychologue, ostéopathie, etc …). Ce poste de préjudice inclut les dépenses restées à la charge de la victime une fois que la sécurité sociale ou les mutuelles ont versé leur remboursement. En effet, il n’est pas exclu qu’à côté de la part payée par la sécurité sociale, la victime doive payer une partie des dépenses de santé. C’est le cas notamment quand celle-ci n’a pas de mutuelle.
Ce poste de préjudice a pour but d’indemniser la victime de toutes les dépenses auxiliaires aux dépenses de santé qu’elle a dû réaliser avant sa consolidation. La nomenclature Dintilhac ne nous donne pas une liste exhaustive. Sont notamment inclus les frais d’honoraire du médecin conseil durant l’expertise médicale et ceux de l’avocat pour la procédure d’expertise, ou encore les frais de location de TV pendant l’hospitalisation, etc. En outre, sont considérés comme des frais divers, les dépenses qui ne peuvent pas être assumées par la victime à cause de son état tels que les frais de garde d’enfants ou l’assistance temporaire d’une tierce personne par exemple. Ainsi, la Cour de cassation a considéré que les dépenses effectuées pour rémunérer un jardinier pour la taille des arbres et pour qu’il entretienne les haies constituent des frais divers (Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 9 juillet 2015, 14-15.309).
Entre la survenance de l’accident et la consolidation, la victime peut être amenée à ne pas pouvoir travailler (totalement ou partiellement). Cela a donc une répercussion sur sa vie professionnelle et la plupart du temps la priver de ses revenus. Cette perte peut être totale, c’est à dire que la dire que la victime est privée de l’intégralité du salaire qu’elle aurait normalement perçu mais aussi partielle. Ce poste de préjudice va donc compenser cette perte. Les indemnités journalières accordées par la sécurité sociale notamment ou par les employeurs du secteur public (établissement public administratif, armée, collectivité territoriale …) doivent être prises en considération pour l’évaluation de ce préjudice. A l’inverse, la Cour de cassation a considéré que les allocations de chômage, le revenu minimum d’insertion ainsi que l’allocation complémentaire de l’indemnité d’insertion ne doivent pas être déduites du préjudice subi par la victime (2e Civ., 24 mai 2006 pourvoi n° 04-19.210).
Les dépenses de santé futures portent sur la période après la consolidation. La victime est dans un état pathologique qui ne pourra pas évoluer malgré la mise en place d’une médication adaptée. Elle peut devoir avoir besoin de médicaments de manière répétée ou encore de se faire poser une prothèse ou un appareillage spécifique. Cela va engendrer des coûts qui seront indemnisés grâce à ce poste de préjudice.
Suite à l’accident, la victime peut souffrir d’un handicap permanent qui ne pourra plus évoluer malgré la mise en place d’une médication adaptée. Celle-ci va donc devoir adapter son quotidien à sa nouvelle situation. Cela passe notamment par l’aménagement de son logement afin qu’elle puisse y vivre. Parfois, aménager le logement ne suffit pas, la victime doit intégrer un établissement spécialisé ou investir dans un logement adapté. Cela représente un coût considérable qui sera indemnisé par ce poste de préjudice. La Cour de cassation a décidé en 2006, que devait être versé une indemnité du même montant que l’acquisition et que l’aménagement d’un logement adapté à une victime en fauteuil roulant lorsqu’elle doit changer de logement pour pouvoir vivre décemment (Chambre criminelle 10 du 10 Janvier 2006 n°05-842256). La Cour de cassation a même considéré que les coûts d’achat d’un terrain, de constructions ainsi que les honoraires de l’agent immobilier pouvaient être indemnisés. Ce préjudice sera évalué au regard de la situation personnelle de la victime au moment de l’accident et des caractéristiques de son logement (C.Cass 3 nov.2011 n°10/26997).
Suite à l’accident, la victime peut souffrir d’un handicap permanent qui ne pourra plus évoluer malgré la mise en place d’une médication adaptée. Celle-ci va donc devoir adapter son quotidien à sa nouvelle situation. Cela passe notamment par l’aménagement de son véhicule pour pouvoir y faire rentrer son fauteuil roulant ou adapter l’ergonomie de son volant par exemple. Par ailleurs, à cause de son état, la victime peut ne plus pouvoir accéder aux transports en commun. Les coûts supplémentaires que représentent désormais les frais de transports pourront être indemnisés grâce à ce poste de préjudice.
Un handicap permanent peut résulter de l’accident. La victime subit donc une perte d’autonomie qui nécessite l’aide d’une personne au quotidien. L’indemnisation inclut l’assistance d’un professionnel mais aussi l’assistance d’un membre de la famille. La Cour de cassation précise dans un arrêt du 28 Novembre 2001 que l’indemnisation ne doit pas être réduite si l’aide est assurée par une personne de la famille de la victime (Ass. Plén., 28 novembre 2001, pourvoi n° 00-14.248).
Suite à l’accident, la victime peut subir un dommage corporel permanent (un handicap par exemple) qui peut entrainer des modifications dans sa vie professionnelle. Il peut ne plus être apte à avoir le poste qu’il occupait auparavant ( à cause des soins journaliers qu’il doit recevoir par exemple). Son handicap peut provoquer la perte de son emploi, le contraindre à changer d’emploi ou passer à un emploi à temps partiel. La cause directe étant l’accident, il est normal que la victime soit indemnisée des revenus qu’elle perd à cause de ces modifications. L’estimation de la perte de revenus se fondera sur ses revenus antérieurs.
L’état de santé altéré (après consolidation) de la victime provoqué par l’accident peut avoir une incidence sur sa vie professionnelle. La victime peut se voir dévalorisée sur le marché du travail à cause de son handicap (entrainant une fatigabilité par exemple). Il peut être plus difficile pour elle d’être embauchée à cause de sa situation nouvelle (perte de chance). En outre, elle peut devoir abandonner sa profession au profit d’une autre qui lui correspondrait moins. Cela va avoir un impact non seulement sur ses revenus mais aussi sur le montant de sa retraite. Il est donc nécessaire d’indemniser cette baisse de revenus. Ce poste de préjudice est plus ardu à évaluer pour les personnes qui ne sont pas encore rentrées dans la vie active (lycéens par exemple) mais ils ne sont pas exclus de ce poste de préjudice pour autant. Par exemple, la Cour de cassation avait considéré que la cécité d’un oeil d’un jeune homme de 17 ans, titulaire du brevet du collèges constituait une perte de chance de reprendre l’activité de ses parents forains car il ne pouvait plus passer le permis de conduire poids-lourds. Le préjudice d’incidence professionnelle était donc caractérisé. (Civ. 2eme, 16 janv.2014,n°13-10566).
Ce poste de préjudice vise à indemniser l’impact que va avoir l’accident, les dommages qu’il engendre sur la vie « scolaire » et « universitaire », plus généralement sur la formation de la victime. En effet, même après la période de convalescence, la victime peut ne plus pouvoir se rendre au lycée ou à l’université durant un certain laps de temps. Par ailleurs, il n’est pas rare qu’à cause de son handicap elle se ré oriente (changer de cursus universitaire, de filière). La Cour de cassation avait considéré que la victime (étudiante en psychologie) pouvait se voir reconnaitre un préjudice universitaire suite à l’amputation de son bras et de la pénibilité accrue pour la poursuite de ses études qui en résultait (C.A. Lyon, 12 novembre 2009, n° 08-04099).
Ce poste de préjudice vise à indemniser l’impact non économique de l’accident, et des dommages temporaires qui en résultent (avant la consolidation). Cet « impact » correspond à l’incapacité totale ou partielle qui va entrainer une gêne dans l’accomplissement des actes de la vie courante de la victime (marcher, monter les escaliers, conduire, porter une charge etc …). Ce préjudice est propre à chaque victime et sera donc évalué selon l’âge, le mode de vie, les intérêts, l’environnement de la victime. On parle de préjudice « temporaire », car cette gène est évaluée durant la période de convalescence.
Les souffrances endurées (pretium doloris) désignent l’ensemble des souffrances psychiques et physiques de la victime ainsi que des bouleversements qui en résultent pendant la période de convalescence. Ce préjudice est évalué au regard des circonstances du dommage, des actes chirurgicaux et des actes de soins invasifs ou non réalisés, de l’âge de la victime. Ce poste de préjudice est symboliquement très important pour la victime et revêt donc une importance majeure pour sa reconstruction. La Cour de cassation dans un arrêt du 2 février 2017 a inclu dans ce poste de préjudice, le préjudice d’angoisse de mort imminente.
Pendant sa maladie traumatique la victime (avant consolidation) peut subir une altération majeure de son apparence physique. Cela peut se caractériser par des cicatrices (grands brulés, traumatisés de la face), une perte de poids importante, l’obligation de recourir à des appareillages, altération de l’apparence physique (trachéotomie, assistance respiratoire, etc …). De ce fait, la victime se confronte à cette image d’elle même et doit se présenter au monde avec ce physique altéré. Cela peut avoir des conséquences importantes sur son psychisme (état dépressif). C’est cet impact qui doit être indemnisé par ce poste de préjudice temporaire. La Cour de cassation a souligné dans un arrêt du 3 juin 2010 que le préjudice esthétique temporaire doit être distingué des souffrances endurées (Civ. 2e, 2 Juin 2010, n°09-15730).
Il est défini par la Commission Européenne (Conférence de Trèves de Juin 2000) et par la Nomenclature Dintilhac. C’est un préjudice non économique lié à une baisse de la capacité physique, psychosensorielle (perception du monde qui nous entoure) ou intellectuelle de la victime. Le terme « permanent » signifie que l’état de la victime ne s’améliorera pas même avec un traitement médical adapté à sa situation. Ce poste de préjudice prend en considération la diversité des atteintes que la victime doit subir au quotidien. Il va non seulement indemniser les atteintes aux fonctions physiologiques, la douleur permanente ressentie, la perte de la qualité de vie mais aussi les troubles dans les conditions d’existences.
Reconnaître l’existence d’un préjudice d’agrément (inscrit dans la Nomenclature Dintilhac) est emprunt d’une valeur symbolique forte. Cela témoigne de la reconnaissance des conséquences qu’un accident peut provoquer sur les plaisirs de la vie de la victime et de la nécessité de les réparer ou du moins de les compenser. Sa définition a fait l’objet de fluctuations jurisprudentielles importantes. La dynamique a été de passer d’une conception élargie de ce préjudice à une vision progressivement de plus en plus stricte tel qu’en témoigne le revirement de jurisprudence en date de 2009. La Cour de Cassation, dans un arrêt de principe du 28 mai 2009, le définit en effet de manière étroite et restrictive. Il vise « exclusivement à réparer le préjudice d'agrément spécifique lié à l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité sportive ou de loisirs ». Pour que les victimes se voient donc reconnaître ce préjudice, elles ont l’obligation rapporter la preuve qu’il est impossible pour elles de réaliser les activités sportives ou de loisirs auxquelles elles s’adonnaient avant l’accident. Ce caractère nécessairement « impossible » leur était donc défavorable. On peut donc saluer la décision de la Cour de cassation dans une décision récente du 29 mars 2018 de venir inclure dans le préjudice d’agrément « la limitation » de la pratique antérieure. Le « préjudice d’agrément » tend donc à la réparation de l’impossibilité ou de la limitation pour la victime de pouvoir exercer une activité spécifique sportive, associative ou encore de loisir.
Le terme « esthétique » sous entend une altération de l’apparence physique par des mutilations (amputations), cicatrices, déformations, rupture de l’harmonie du corps humain (paraplégie, tétraplégie etc ..), de sa gestuelle ou de sa démarche (boitement etc). Le préjudice va naitre de cet état qui peut générer chez la victime une souffrance morale/psychologique à cause de la manière dont il se perçoit mais aussi de la façon dont il se présente au monde. Le terme « permanent » signifie que l’état de la victime ne s’améliorera pas même avec un traitement médical adapté à situation. Son état physique altéré pouvant générer une répulsion qui risque d’entraver sa vie relationnelle ou son avenir (professionnel ou personnel). Ce préjudice est évalué en fonction de l’âge, du sexe, de la situation personnelle et de famille de la victime. En outre, si le préjudice esthétique permanent a une incidence économique sur la profession de la victime, par exemple si celle-ci est hôtesse de l’air, cet aspect économique du préjudice devra être indemnisé
Le préjudice sexuel permanent se différencie du préjudice d’agrément et du déficit fonctionnel permanent. Ce préjudice recouvre trois aspects distincts qui ne sont pas exclusifs les uns des autres et peuvent êtres cumulés : le préjudice morphologique lié une altération des organes sexuels primaires et secondaires qui rend fonctionnellement impossible l’acte sexuel ou le limite; le préjudice lié à la perte plaisir que procure l’acte sexuel (perte de l’envie, perte de libido); le préjudice fondé sur une impossibilité ou à une difficulté à procréer (déficit hormonal, trouble de l’éjaculation). Ce préjudice répond à la nécessité de réparer ou de compenser les multiples altérations possibles à la vie sexuelle de la victime, ce qui est soulignée par la Cour de cassation dans un arrêt de la 2e Chambre Civile 17 juin 2010 : «Le préjudice sexuel comprend tous les préjudices touchant à la sphère sexuelle (…) ». La survenance d’un accident quelqu’il soit n’est pas réductible aux seules altérations du corps. Les multitude de formes d’expression qu’il peut prendre, la gène qu’il peut faire naître chez la victime, le fait qu’il soit inhérent à la sphère intime sont autant d’obstacles à sa juste évaluation. Il est donc fondamental que la victime ne le minimise pas ou ne la passe sous-silence afin que l’évaluation qui en sera faite soit la plus équitable possible.
Il s’agit de la perte de l’espoir de réaliser tout « projet personnel de vie » ( fonder une famille, élever des enfants) en raison de la gravité du handicap. Il est à distinguer du préjudice sexuel et du préjudice d’agrément (Cass. 2e civ., 12 mai 2011). Il est symbolisé par la présence de séquelles physiques ou de contraintes thérapeutiques qui rendent difficile ou empêchent totalement la rencontre d’un partenaire, l’engagement, la construction d’une relation de couple. L’accident peut aussi entrainer la rupture de la relation existante ou une altération de la possibilité pour la victime de remplir son rôle au sein de la famille (s’occuper des enfants, s’occuper des parents vieillissants) qui bouleverse le mode de vie familial. Ainsi, la Cour de cassation dans une décision du 15 Janvier 2015 à décidé que le fait d’avoir eu des enfants d’une préalablement à l’accident n’empêche pas la victime de se voir reconnaitre un préjudice d’établissement. Sa précédente union étant dissoute, son handicap nouveau constitue « une perte d’espoir et de chance de réaliser un projet de vie familiale ». (Cass. 2e civ., 15 janv. 2015).
Le terme « exceptionnel » sous-entend un préjudice atypique qui engendre un retentissement particulier sur la victime en raison de sa singularité, ou en raison des circonstances qui entourent l’accident ou encore de la nature spécifique de l’accident à l’origine du dommage (attentat etc). C’est le rapport Dintilhac qui a proposé la création de ce poste de préjudice. Il introduit une souplesse et une reconnaissance de la singularité de l’individu. La Cour de cassation a considéré que la victime « d'une tentative d'assassinat de la part de son ami » lui ayant infligé une multitude coups de couteaux sur l’intégralité de son corps constitue des circonstances particulières car celle-ci a été réalisée par un proche. De ce fait, la victime est en droit d’obtenir une indemnisation d’un préjudice permanent exceptionnel (Cour de cassation, Chambre civile 2, 11 septembre 2014, numéro de pourvoi 13-10691).
Il s’agit des pathologies souvent incurables qui risquent d’évoluer après la consolidation. Cette possibilité d’évolution est en effet inhérente à la caractéristique de la maladie. C’est le cas du virus du VIH, de l’hépatite C, de la maladie de Creutzfed-Jacob ou de la contamination causée par l’amiante. Le préjudice résulte de la conscience de la victime d’avoir été contaminée entrainant un risque d’apparition à échéance variable d’une pathologie pouvant engager son pronostic vital. La Cour de cassation a décidé dans un arrêt du 18 mars 2010 que le préjudice résultant de la contamination par le virus l’hépatite C « comprend l’ensemble des préjudices de caractère personnel tant physiques que psychiques résultant du seul fait de la contamination virale » (Civ. 2, 18 mars 2010, n°08-16.169). Est mis en exergue le fait que ce poste de préjudice prend en considération les angoisses et craintes éprouvées par la victime concernant son espérance de vie. Ce préjudice a une double dimension, physique et psychique. En outre, il est fondamental de souligner que la guérison ne s’oppose pas à une indemnisation ( Civ. 2e, 4 Juillet 2013, n°12-23915).
Les proches de la victime directe, considérés comme des victimes indirectes peuvent engager une action directe contre le responsable du dommage. Cette possibilité se distingue de la possibilité accordée aux proches d’être indemnisés de leurs préjudices en cas de décès. Les préjudices des victimes indirectes se recoupent en deux grandes catégories : si la victime décède ou si la victime survie. On retrouve sous jacent à cette distinction, le préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux. Dans la situation où la victime serait amenée à décéder, les préjudices patrimoniaux sont les frais d’obsèques, les pertes de revenus des proches, les frais divers des proches. Concernant les préjudices extra-patrimoniaux, on retrouve le préjudice d’accompagnement et le préjudice d’affection. Dans la situation où la victime serait amenée à survivre à l’accident, on retrouve au sein des préjudices patrimoniaux les pertes de revenus des proches et les frais divers des proches. En outre, concernant les préjudices extra-patrimoniaux, préjudice d’affection et les préjudices extra-patrimoniaux exceptionnels.
Ce poste de préjudice porte sur l’ensemble des frais engagés pour les obsèques (dépenses relatives à la cérémonie religieuse) et pour la sépulture (aménagement du caveau) par les proches de la victime du dommage.
La victime indirecte peut obtenir une indemnisation au titre d’une « perte de revenus des proches en cas de décès de la victime ». On peut distinguer deux périodes durant lesquelles les proches peuvent voir leurs revenus diminuer. D’abord sur la période à compter de l’accident jusqu’au décès de la victime, ses proches ont dû se rendre disponibles pour l’accompagner et de ce fait, réduire leurs horaires de travail voire abandonner leur poste. Ensuite le décès de la victime va supprimer une source de revenus au sein du foyer familial. Le conjoint, concubin et/ou les enfants à charge de la victime directe en seront nécessairement impactés. En outre, une diminution ou la perte des revenus peut survenir « par ricochet ». C’est le cas lorsque qu’une mère au foyer décède et que le veuf doit réaliser des dépenses pour l’entretien du logement et la garde des enfants (Civ. 2eme, 7 avril 2011, pourvoi n°10-15918). Les victimes indirectes sont en droit d’en demander réparation sous réserve qu’elles soient en lien direct avec l’accident et que le préjudice soit « certain ».
Les victimes indirectes peuvent demander réparation des dépenses engagées précédemment au décès de la victime directe. Concrètement ce sont les dépenses occasionnées par les déplacements, la restauration ou encore le logement pour l’accompagnement de ses derniers instants.
L’accompagnement de la fin de vie d’un proche est une épreuve chronophage qui épuise les ressources psychiques et physiques de l’accompagnant. La nomenclature Dintilhac a donc reconnu la nécessité d’indemniser « le préjudice d’accompagnement ». Il désigne l’impact moral et les bouleversements survenant dans la « communauté de vie affective et effective avec le défunt » entre la survenance de l’accident et le décès. Il ne se limite pas aux proches vivants dans le même foyer. Il faut cependant rapporter la preuve tangible de cette communauté de vie « affective et effective ».
Le préjudice d’affection est le préjudice moral, c’est à dire l’impact du décès sur la personnalité ou le mental, des proches de la victime directe. Par le terme « proche » on désigne notamment les parents, les grands parents, les frères et soeurs, les petits enfants, les enfants mais aussi toutes les personnes qui partageaient une communauté de vie avec la victime directe. La communauté de vie permet de ne pas avoir a justifier d’un lien de parenté avec la victime directe. Ce préjudice est présumé pour les victime indirectes les plus proches tels que les parents ou le conjoint de la victime. Cependant pour ceux qui n’ont pas de lien de filiation ou d’alliance, ils doivent démontrer une relation particulière par la fourniture de preuves d’activités pratiquées en commun avant le décès par exemple. Le préjudice d’affection peut être constitué par un deuil considéré comme « normal » (bouleversement psychique) mais aussi par deuil pathologique (dépression sévère).
En cas d’accident, le quotidien de l’entourage proche de la victime est bouleversé et peut nécessiter une importance ré-organisation du quotidien. En effet, l’état de santé de la victime directe peut nécessiter un temps d’hospitalisation plus ou moins long ou présenter des séquelles lourdes qui nécessite(nt ?) l’assistance des proches. Pour réaliser cet accompagnement, le proche peut dans un premier temps, au regard des circonstances, devoir être amené à demander une diminution de son temps de travail voire abandonner de manière temporaire ou définitive son poste (afin d’assister la victime handicapée par exemple). Cette perte de revenu peut aussi être occasionnée par le handicap dont est atteint la victime directe. A titre d’exemple, une épouse qui ne peut plus s’appuyer sur l’aide de son mari pour assurer les tâches du foyer et s’occuper des enfants va devoir y faire face seule. C’est ainsi que la Cour de cassation a considéré que cette situation engendrait « un surcroit d’activité » causé par l’état de son époux, celle-ci pouvant donc se voir reconnaitre le préjudice de perte de revenus. (Civ. 2eme, 13 Juin 2013, n°12-15632). Somme toute, ce préjudice est représenté par les répercussions économiques personnelles de la victime indirecte en lien direct avec l’accident de la victime directe.
Ce poste de préjudice met en lumière la nécessité d’indemniser les proches suite aux frais engagés pour leur présence et leur investissement auprès de la victime directe. Les dépenses ayant été effectuées par les proches durant l’évolution de la maladie traumatique mais aussi celles ayant été engendrées par le handicap doivent être prises en compte dans l’indemnisation de la « victime par ricochet ». Ces frais peuvent être très divers. Sans en faire une liste exhaustive, ils peuvent être constitués par les frais de transport pour se rendre au chevet de la victime à l’hôpital.
Il s’agit d’un préjudice moral. Il est d’abord ressenti pendant la période d’attente du diagnostic marquée par l’incertitude et l’anxiété suscitées par la gravité de l’état de la victime mais aussi par les inquiétudes éprouvées par la convalescence d’autant plus importantes qu’elle sera longue (traumatisés crâniens par exemple). Ensuite, une fois la consolidation acquise les proches sont confrontés aux séquelles de l’accident subi par la victime (handicap moteur lourd par exemple). Dans certains cas, les proches dans leurs rôles d’accompagnants doivent se confronter inévitablement à la souffrance, la douleur, et l’altération physique de la victime directe. Il doivent faire le deuil de ce qu’elle était avant l’accident et doivent accepter l’état nouveau dans lequel elle se trouve. La Cour de cassation a considéré que le préjudice d’affection était constitué par le chagrin des parents de voir leur fille lourdement handicapée des suites d’un accident de la circulation (C.A. Lyon, 21 avril 2011, n° 10-02079). Ces situations entrainent parfois une altération du lien qui était entretenu avec la victime directe. Cela peut notamment être constitué par l’impossibilité de réaliser un loisir ensemble à cause du handicap de la victime. Les proches doivent tout d’abord l’intégrer et par la suite, essayer de l’accepter. Ces différentes étapes d’intégration et d’acceptation peuvent parfois être longues et sinueuses et ont un impact inévitable sur le moral des proches.
Ce poste de préjudice porte sur le changement dans le quotidien des proches de la victime directe suite à sa survie mais handicapée. On parle aussi de « trouble dans les conditions d’existences » .Il vise à indemniser les changements qui apparaissent dans le mode de vie des proches au quotidien. Cela peut se caractériser par les trajets et visites répétées de la victime à l’hôpital, le fait d’être privé des activités exercées personnellement (familiale, associatives culturelles ..). Mais le trouble dans les conditions d’existence peut survenir des suites de la réalisation de travaux dans le logement afin de l’adapter au handicap de la victime, réduisants l’espace de vie des proches, ce qui leur entraine une « gène très importante » en plus d’être témoins des souffrances de la victime au quotidien (Cass. 1er civ., 15 sept. 2011, n°10-16.840).
La « consolidation du dommage corporel » est un moment clés dans l’évaluation des préjudices de la victime. En effet, pour l’évaluation d’un préjudice on distingue la période avant consolidation et celle après consolidation. Le laps de temps avant la consolidation, c’est à dire la période partant de la survenance de l’accident jusqu’à la consolidation correspond à la période de convalescence de la victime. Cette période de convalescence se caractérise par la fluctuation de l’état de la victime. En effet, de nouveaux dommages peuvent survenir durant cette période ou l’état de santé de la victime peut s’améliorer petit à petit. On a donc une incertitude sur l’importance finale du dommage que subira la victime. La consolidation ancre dans le temps le moment où l’état de la victime ne sera plus susceptible d’évoluer malgré la mise en place d’une médication adaptée. Les dommages résultant de l’accident revêtent, à partir de la date de consolidation, un caractère permanent. Avant la consolidation, ils n’avaient qu’un caractère temporaire. Ce n’est qu’à partir de la date de consolidation que la victime pourra recevoir l’entièreté de son indemnisation correspondant à la réparation de son préjudice. Enfin, la date de consolidation fait courir le délai de prescription pour exercer une action en justice.