Substitution de l’EFS par l’ONIAM

Avis du Conseil d’Etat n°343823, 18 mai 2011.

Suite à la question posée par la Cour administrative d’appel de Paris dans un arrêt du 11 octobre 2010, le Conseil d’État rend l’avis selon lequel l’ONIAM (Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux) se substitue à l’EFS (Établissement français du Sang), tant à l’égard des victimes que des tiers payeurs, dans le cadre des procédures d’indemnisation des victimes de préjudices résultat de la contamination par le VHC causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang.

De fait, l’ONIAM indemnise les victimes au titre de la solidarité nationale dans l’exercice de la mission qui lui est confiée par les articles L.1142-22 et L.1221-14 du Code de la santé publique et non en qualité d’auteur responsable.

Par ailleurs, les tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime d’un dommage entrant dans les conditions énoncées ci-dessus ne peuvent exercer de recours subrogatoire contre l’ONIAM, mais pourront l’exercer contre l’EFS en qualité de responsable du dommage, de même que l’ONIAM peut exercer un recours de même nature à l’encontre de l’EFS si tant est que le dommage soit imputable à une faute de l’établissement de transfusion sanguine et à condition que celui-ci soit couvert par une assurance.

Le médecin qui exerce hors de sa spécialité commet-il l’infraction d’exercice illégal ?

Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation n°10-83330, 8 mars 2011.

Malgré un refus d’autorisation d’exercer la spécialité de chirurgie plastique et reconstructrice et esthétique (C.P.R.E), opposé par l’Ordre des médecins et confirmé par le Conseil d’État en 2002, un médecin stomatologue et compétent en chirurgie maxillo-faciale, a exercé cette spécialité de 2001 à 2004. On peut préciser que ce refus avait été motivé par l’insuffisance de formation du praticien et que, pour sa part, le médecin en cause opposait à l’instance ordinale qu’il lui était nécessaire de pratiquer la C.P.R.E pour être apte.

Ce médecin est renvoyé devant le tribunal correctionnel pour exercice illégal de la médecine et déclaré coupable, décision confirmée par la cour d’appel qui le condamne en outre à régler 2.000 euros de dommages et intérêts au Conseil Départemental de l’Ordre des médecins de la ville de Paris. La Cour de Cassation censure la cour d’appel au motif que « ne commet pas une infraction pénale, une personne titulaire du diplôme de Docteur en médecine et inscrite au Conseil de l’Ordre, qui sort des limites de sa spécialité ou de sa compétence ».

Maladie professionnelle et perte de promotion professionnelle

Arrêt de la Cour de Cassation n°10-11521 du 3 mars 2011.

La Cour de Cassation rejette le pourvoi formé par Monsieur X, victime d’une maladie professionnelle qui entendait obtenir réparation de la perte d’une promotion professionnelle, à la suite de la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Son pourvoi a été rejeté car M. X ayant accepté une mise à la retraite étrangère à sa maladie professionnelle, la Cour de Cassation a pu juger qu’il n’y avait pas eu de relation de cause à effet entre sa maladie professionnelle et la perte de chance d’une promotion.

Indemnisation des victimes par ricochet

Décision du conseil d’État n°327669, 30 mars 2011.

Dans sa décision du 30 mars dernier, le Conseil d’État rappelle que les préjudices subis par Mme X, victime par ricochet des multiples séquelles dont souffre M. X suite à une intervention chirurgicale, ne sauraient être indemnisés par l’ONIAM, estimant que les dispositions du Code de la santé publique excluent que l’ONIAM répare, hors cas de décès, des dommages autres que ceux subis par la victime.

Il annule ainsi l’arrêt de la Cour Administrative d’Appel et précise que le montant correspondant au dommage résultant de la perte de chance de M. X de se soustraire aux conséquences d’un accident médical doit être soustrait à la réparation due par l’ONIAM.

Responsabilité de l’EFS en cas de patient exposé à plusieurs sources de contamination

Décision du Conseil d’État n°320734, 16 mars 2011.

Aux termes d’une décision du 16 mars 2011, le Conseil d’État condamne l’Établissement Français du Sang à indemniser le requérant du préjudice subi – contamination sanguine suite à plusieurs transfusions – aux motifs que l’EFS n’a pas apporté la preuve qui aurait permis d’exclure sa responsabilité et ce bien que le requérant ait été exposé à d’autres sources de contamination.

Maladie professionnelle et faute inexcusable de l’employeur

Arrêt de la 2ème Chambre Civile de la Cour de Cassation n°10-15145, 17 mars 2011.

La Cour de Cassation annule l’arrêt de la Cour d’Appel qui avait retenu la demande de M. X et selon lequel la société Y a été reconnue responsable de la maladie professionnelle de M. X.

En effet, la maladie déclarée ne remplissant pas les conditions d’un tableau des maladies professionnelles, la Cour de Cassation a jugé que la Cour d’Appel aurait dû recourir à un second avis de la part d’un autre comité régional pour prendre sa décision, le caractère professionnel de la maladie étant de plus contesté par l’employeur.

Etat de santé antérieur et anormalité du dommage

Arrêt de la 1ère Chambre Civile de Cassation n°09-17135, 31 mars 2011.

La Cour de Cassation rejette le pourvoi des consorts X – venant aux droits du demandeur décédé – déboutés de leur demande d’indemnisation auprès de l’ONIAM par la cour d’appel.

La Cour de Cassation rappelle en effet que la solidarité nationale, relative à l’indemnisation de dommages subis par le patient et découlant directement d’actes médicaux, ne saurait s’appliquer lorsque les conséquences des interventions subies, si préjudiciables soient-elles, ne relevaient pas de l’anormalité au vu de l’état de santé antérieur du patient et de l’évolution prévisible de celui-ci.

Expertise médicale et impartialité de l’expert

Décision du Conseil d’État n°330161, le 30 mars 2011.

Aux termes d’une décision du 30 mars 2011, le Conseil d’État annule l’arrêt de la Cour d’Appel de Nancy aux motifs qu’elle a mésestimé l’impartialité de l’expert désigné dans le cadre de la procédure en référé.

L’expert avait en effet déjà fréquenté, lors de travaux scientifiques de recherches, avant et après l’expertise, le médecin dont il devait apprécier la pratique lors de l’intervention litigieuse.

Accouchement au forceps et défaut de surveillance

Décision du Conseil d’État n° 338566, 30 mars 2011.

Le Conseil d’État, réformant l’arrêt d’une Cour d’Appel, reconnait le caractère fautif de l’utilisation d’un forceps ainsi que l’absence de surveillance adaptée aux complications ayant entraîné le décès d’un enfant, survenue deux jours après l’accouchement.

La Cour d’Appel avait en effet retenu uniquement la faute de geste lors de l’accouchement, estimant que celle-ci n’était à l’origine que de la seule perte de chance de survie de l’enfant et avait, en conséquence, diminué les indemnisations sollicitées. Par ailleurs, elle  n’avait pas pris en compte l’absence de surveillance alléguée par les parents.

Le Conseil d’État considère que le choix par le médecin du recours au forceps au lieu d’une césarienne a fait courir des risques graves et injustifiés à l’enfant et, rejetant la qualification de perte de chance de survie retenue par le juge d’appel, condamne l’établissement hospitalier à indemniser intégralement les dommages personnels de l’enfant décédé ainsi que ceux des parents.

Appel à la cause de l’ONIAM, au besoin d’office

Arrêt du Conseil d’État n°320581, 30 mars 2011.

En première instance, le tribunal administratif  retient la responsabilité d’un hôpital public pour un acte qu’il qualifie de fautif et le condamne à indemniser le préjudice du patient. La cour d’appel retient en revanche l’existence d’un accident médical non fautif mais n’appelle pas à la cause l’ONIAM qui n’avait pas été initialement partie à la procédure.

Le Conseil d’État annule l’arrêt de la Cour Administrative d’Appel en relevant qu’à partir du moment où un dommage constaté remplit les conditions pour être indemnisé partiellement ou totalement sur le fondement du II de l’article L.1142-1-1, l’ONIAM aurait dû être appelé en la cause, au besoin d’office, afin d’indemniser le patient et ce, même si les conclusions ne sont pas dirigées contre lui.