Cour d’appel de Paris, 20 septembre 2011
Fin mars 2007, un patient développe une pneumopathie bilatérale à pneumocoque. Le 30 mars 2007, il présente un syndrome de détresse respiratoire aigüe (SDRA) et est adressé aux urgences de l’hôpital Saint-Louis à Paris, dépendant de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (APHP).
Il y fait un choc sceptique et un grave trouble cardiaque. La fonction cardiaque ayant été rétablie in extremis, il est alors transféré en service de réanimation où il est plongé dans un coma artificiel puis en pneumologie ; il sort finalement de l’hôpital le 2 mai 2007.
En juin 2007, il est contacté par téléphone à son domicile par une personne chargée du suivi des patients de l’hôpital Saint-Louis inclus dans un protocole de recherche biomédicale.
Il comprend alors que la décision de l’intégrer dans ce protocole a été prise les 31 mars et 1er avril alors qu’il était dans le coma, par conséquent à son insu ainsi qu’à l’insu de celui de sa famille et notamment de sa fille présente à l’hôpital dès l’admission de son père et dont l’hôpital possédait les coordonnées téléphoniques.
Ce protocole avait pour objectif de savoir si une curarisation initiale améliore les résultats de la ventilation mécanique par diminution des résistances thoraciques lorsque le respirateur insuffle de l’air ou de l’oxygène dans les poumons du patient atteint de SDRA. Le but de cette étude étant de diminuer, avec cette technique, la « morbi-mortalité » très élevée observée dans les SDRA. Le protocole prévoyait que les patients recevant la molécule active ou un placebo étaient tirés au sort.
Les conditions d’inclusion dans cette étude pour le patient étaient : d’être atteint d’un SDRA, d’être âgé de plus de 18 ans, de ne pas être allergique aux curares et d’être consentant après avoir reçu une information claire et loyale.
En l’espèce, le patient a poursuivi le pneumologue et l’APHP pour avoir réalisé une recherche biomédicale d’urgence sans son consentement ni celui de ses proches.
Il a également poursuivi le CHU de Marseille en qualité de promoteur de la recherche biomédicale.
D’une part, la Cour d’appel retient qu’aux termes de l’article L.1122-1-1 du code de la santé publique, il appartient à l’investigateur, préalablement à la réalisation d’une recherche médicale, de fournir à la personne concernée ou à un tiers les informations de nature à rendre son consentement libre et éclairé.
En l’espèce, le pneumologue était l’investigateur de la recherche, il engage donc sa responsabilité à l’égard du patient, lequel subit un préjudice moral du fait que son consentement ou celui d’un tiers n’a pas été recherché.
D’autre part, concernant le CHU de Marseille, promoteur de la recherche, la Cour estime que pour que sa responsabilité soit engagée, le patient doit prouver l’existence d’un préjudice qui résulterait des conditions dans lesquelles la recherche biomédicale a été effectuée et dont le promoteur peut avoir à répondre du fait des dispositions de l’article L.1121-10 CSP.
Or, en l’espèce les conditions dans lesquelles le patient a été traité dans le cadre du protocole de recherche ne lui ont causé aucun dommage. De plus, il n’a pas été allégué que les conditions de mise en œuvre dudit protocole n’auraient pas été conformes à celles qui avaient motivé l’avis favorable du Comité de protection des personnes.