Cour de Justice de L’Union Européenne, gde ch., 21 déc. 2011, aff. C-495/10, Centre hospitalier universitaire de Besançon c/ M. D., Caisse primaire d’assurance maladie du Jura :
M. D., alors âgé de 13 ans, a été victime, au cours d’une intervention chirurgicale pratiquée le 3 octobre 2000 au CHU de Besançon, de brûlures causées par un défaut du système de régulation de la température du matelas chauffant sur lequel il se trouvait installé.
Par un jugement du 27 mars 2007, le tribunal administratif de Besançon a condamné le CHU de Besançon à réparer le dommage ainsi occasionné à M. D. moyennant le versement, à ce dernier, d’une somme de 9 000 euros et, à la caisse primaire d’assurance maladie du Jura, d’une somme de 5 974,99 euros.
L’appel interjeté à l’encontre de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Nancy par le CHU de Besançon ayant été rejeté par un arrêt du 26 février 2009, ce dernier s’est pourvu en cassation devant le Conseil d’État.
À l’appui de ce pourvoi, le CHU de Besançon soutient que la Cour administrative d’appel de Nancy a méconnu la directive 85/374, (dite « produits défectueux ») et notamment l’article 13 de celle-ci, en jugeant que cette directive ne fait pas obstacle à l’application du principe jurisprudentiel selon lequel le service public hospitalier est responsable, même en l’absence de faute de sa part, des conséquences dommageables pour les usagers de la défaillance de produits ou d’appareils utilisés dans le cadre des soins dispensés. Selon le CHU, il résulterait en effet de la directive que le producteur du matelas doit être tenu pour seul responsable dès lors qu’il était, comme en l’occurrence, dûment identifié.
Par décision du 4 octobre 2010, le Conseil d’État a sursis à statuer et saisi la CJUE d’une question préjudicielle aux fins de savoir si la directive « produits défectueux » limite la possibilité pour les États membres de définir la responsabilité des personnes qui utilisent des appareils ou produits défectueux dans le cadre d’une prestation de services et causent, ce faisant, des dommages au bénéficiaire de la prestation.
La Cour dans sa décision du 21 décembre 2011 répond que la responsabilité d’un prestataire de services qui utilise, dans le cadre d’une prestation de services telle que des soins dispensés en milieu hospitalier, des appareils ou des produits défectueux dont il n’est pas le producteur au sens des dispositions de l’article 3 de la directive 85/374 et cause, de ce fait, des dommages au bénéficiaire de la prestation, ne relève pas du champ d’application de cette directive.
La directive, selon la CJUE, ne s’oppose dès lors pas à ce qu’un État membre institue un régime prévoyant la responsabilité d’un établissement public de santé à l’égard des dommages occasionnés, même en l’absence de toute faute imputable à celui-ci, à condition, toutefois, que soit préservée la faculté pour la victime et/ou ledit prestataire de mettre en cause la responsabilité du producteur sur le fondement de ladite directive lorsque se trouvent remplies les conditions prévues par celle-ci.